La Nash

14 décembre 2021

La stéatohépatite non alcoolique, kezako, quelles solutions ?

Nous le savons l’alimentation et plus globalement le mode de vie peuvent en partie conditionner notre santé. C’est pourquoi Hippocrate disait déjà au 5e siècle avant J.C. : « Que ton aliment soit ta première médecine ». Malheureusement nous assistons actuellement à l’appauvrissement des sols, et donc des cultures, et en parallèle à des rayons de supermarchés débordants d’aliments ultra-transformés et de produits animaux de mauvaise qualité (nitrites, antibiotiques, acides gras pro-inflammatoires…). Cette dégradation de l’alimentation, conjointement avec la réduction de la dépense énergétique par un mode de vie toujours plus sédentaire (travail en bureau, ascenseurs, escalators, trottinettes électriques…), conduit à l’augmentation des maladies métaboliques (diabète, syndrome métabolique, dyslipidémie…). Nous parlerons ici de la maladie dite du « foie gras », organe directement impacté par nos choix alimentaires. Elle se manifeste d’abord par une stéatose hépatique qui concernait 18% de la population française en 20201. Ce pourcentage risque hélas d’augmenter, du fait de l’explosion des cas de surpoids et d’obésité (la prévalence de l’obésité a triplée entre 1975 et 2016)2 !

Mais avant d’entrer dans le vif du sujet et d’exposer les solutions possibles, revenons aux bases anatomiques et fonctionnelles du foie.

Le foie, un vrai couteau-suisse

Le foie est un organe noble (vital) du système digestif. Il est l’organe le plus volumineux du corps avec une masse supérieure à 1.5kg ! Situé sous le diaphragme, à droite de l’estomac, un volume important de sang passe chaque minute à travers le foie (1.4L). Le foie a 3 fonctions principales dans l’organisme : il reçoit le sang issu de la digestion : il le filtre et l’épure, les substances issues d’absorption du tube digestif sont alors transformées et stockées (ex : stockage énergétique sous forme de glycogène hépatique, triglycérides ou encore transformation de substances toxiques comme l’alcool ou médicaments en composés moins dangereux), pour finir il fabrique la bile (stockée ensuite par la vésicule biliaire et relâchée lors d’un repas dans l’intestin grêle) et de nombreuses protéines (notamment des enzymes digestives, l’albumine, la ferritine, facteurs de coagulation… autant de protéines indispensables).

Notons également que la fonction de stockage du foie lui donne le rôle important de régulation de la glycémie, par relargage ou non de glucose dans le sang.

Quand le couteau-suisse commence à rouiller

Nous l’avons vu, le foie est un organe multitâche qui doit donc être chéri pour parvenir à fonctionner de manière optimale. Une mauvaise alimentation (abondance de produits sucrés, de fructose industriel, un apport déséquilibré en matières grasses…), trop de boissons alcoolisées, un mode de vie sédentaire, certains médicaments (paracétamol, ibuprofène…) ou encore des infections virales (hépatites B et C) peuvent venir endommager cet organe vital.

Parmi les atteintes du foie possibles nous allons nous intéresser de plus près à la stéato-hépatite non alcoolique ou NASH, l’acronyme anglais pour « non alcoholic steatohepatitis ».

Cette maladie du foie non causée par l’alcool concerne une grande partie des personnes diabétiques et obèses. Elle se traduit par une accumulation excessive de graisses dans le foie (stéatose hépatique non alcoolique ou NAFLD pour « non alcoholic fatty liver disease »).

Elle est bénigne pour la majorité des malades (80%) mais à un stade plus avancé la NAFLD peut induire une inflammation et une souffrance des hépatocytes (cellules du foie). Dans le dernier stade d’évolution de la maladie (non réversible), c’est la cirrhose hépatique, soit une fibrose du foie (signe que le foie a dû se régénérer et cicatriser de nombreuses fois). C’est ensuite la porte ouverte vers une insuffisance hépatique, un carcinome hépatocellulaire (cancer) et la nécessité d’une transplantation. C’est une maladie sérieuse à surveiller et à prendre en charge le plus tôt possible, avec des mesures hygiéno-diététiques.

Le diagnostique de la NASH

L’atteinte du foie peut se voir biologiquement via un bilan sanguin avec dosage des enzymes hépatiques dont leur augmentation pourrait témoigner de la souffrance du foie. Il peut également être regardé le statut en fer (un statut en fer trop important est oxydant) et une sérologie virale (anticorps anti hépatite B et C). Des examens comme une échographie, une IRM ou un fibroscan peuvent être demandés par votre médecin pour avoir un diagnostic plus précis.

Les symptômes sont difficilement percevables car cette maladie est dite silencieuse. Néanmoins il peut être retrouvé une fatigue importante, une jaunisse ou des urines très foncées, ce qui doit alerter. C’est au dernier stade que l’on peut remarquer la présence d’ascite, une encéphalopathie.

Attention même une personne mince peut souffrir d’une stéatose hépatique, bien qu’elle soit plus fréquente chez les personnes en surpoids (IMC > 25kg/m²).

Quelles solutions ?

Dans la NAFLD et la NASH, l’alimentation et l’activité physique ont un rôle majeur sur l’évolution de la maladie. Elle peut être renversée avec la mise en place la plus précoce possible d’une bonne hygiène de vie.

L’alimentation moderne, riche en aliments ultra-transformés (matières premières de piètre qualité, dénaturation de l’aliment par des processus agro-industriels, liste d’ingrédients longue, très longue…) impacte directement la santé globale et notamment la santé du foie. A travers ses fonctions de stockage et de détoxification, le foie a du pain sur la planche et se retrouve parfois débordé !

L’augmentation de la glycémie (taux de sucre dans le sang) par des aliments trop sucrés, trop transformés entraîne une insulino-résistance (l’insuline étant l’hormone permettant d’empêcher les hyper-glycémies) et un stockage important de sucre dans le foie sous forme de gras (gouttelettes lipidiques). Les aliments pouvant conduire à ces désagréments sont le fructose extrait de sa matrice (jus de fruits, sirop de glucose-fructose, sodas, biscuits, fast-food, sirops ventés par les industries agro-alimentaires de type sirop d’agave…), les féculents induisant une montée de glucose rapide dans le sang (ceux riches en amylopectine comme la fécule de pomme de terre, la maïzena, le blé, le riz blanc ou rond), les produits sucrés dépourvus de tout micronutriment… Il convient donc de revoir son alimentation pour éviter les pics de glycémie.

  • Dans un premier temps il est important de limiter tous les éventuels toxiques pour le foie de sorte à le soulager :
    • Diminuer fortement la consommation d’alcool ;
    • Stopper les médicaments hépatotoxiques (discuter des alternatives avec son médecin) ;
    • Limiter le plus possible les perturbateurs endocriniens (plastiques alimentaires chauffés, cuisson dans ustensiles abîmés, cosmétiques de mauvaise qualité…) et contraceptions hormonales.
  • Puis mettre en place de bonnes habitudes de vie :
    • Manger le plus possible des aliments biologiques ou issus d’une agriculture raisonnée pour limiter l’ingestion de pesticides surchargeant le foie (substances liposolubles) ;
    • Bouger tous les jours pour limiter la prise de poids.
  • Ensuite l’idéal est de mettre en place un suivi diététique par un(e) diététicien(ne)-nutritionniste pour rééquilibrer son alimentation, ce que nous pouvons vous proposer sur plusieurs mois. Lors de cet accompagnement nous pourrons voir ensemble les recommandations alimentaires dans le cadre de la NASH. Nous travaillerons notamment sur un choix d’aliments à faible indice glycémique ainsi que sur un apport en matières grasses de qualité.

Et la micronutrition dans tout ça ?

Un statut optimal en micronutriments permet également de se protéger des maladies hépatiques :

  • Il faut un apport suffisant d’antioxydants (vitamines C et E, sélénium qui est le cofacteur de la glutathion peroxydase) puisque le foie est l’acteur principal de détoxification de l’organisme.
  • Penser aux oméga 3, acides gras qui contrent l’inflammation présente dans le foie malade.
  • Vérifier que son statut en vitamine D soit satisfaisant. Cette vitamine vient en effet augmenter l’insulino-sensibilité périphérique4 souvent problématique chez les patients diabétiques et/ou obèses. Notons qu’une carence en magnésium limite l’activation de la vitamine D d’où l’intérêt de le doser également. La reconnaissance de l’insuline par les cellules peut également être améliorée par une complémentation en chrome et en zinc (attention la consommation de phytates apportés par les végétaux limite son absorption). Bien sûr avant de se supplémenter il convient de vérifier que l’on consomme assez d’aliments vecteurs de ces minéraux bienfaiteurs, tout autant de facteurs qui seront pris en compte si vous désirez vous faire accompagner sur le plan nutritionnel.
  • Un microbiote intestinal riche et varié en bactéries favorables, vient protéger le foie puisque celui-ci est en amont du foie dans la circulation sanguine. Une alimentation déséquilibrée vient directement modifier ce microbiote, entraînant une dysbiose qui est délétère pour le foie. De ce fait un apport suffisant de fibres (prébiotiques) vient alimenter les « bonnes » bactéries du système digestif. Il est également possible de prendre des prébiotiques en compléments alimentaires, ainsi que des probiotiques dont les souches sont judicieusement choisies pour venir nourrir et entretenir un microbiote de qualité.

Les compléments alimentaires et la phytothérapie peuvent être une aide précieuse pour contrebalancer les dysfonctionnements du foie. Certaines plantes sont dites hépatoprotectrices comme le desmodium ou le radis noir. Citons aussi la cannelle qui améliore l’insulino-sensibilité. Attention pas d’automédication, il est indispensable de se faire aider par un professionnel de santé formé dans ce domaine, et de vérifier les interactions médicamenteuses possibles. Cet aspect pourra également être vu au cours des différentes consultations diététiques que nous proposons.

Pour résumer, hormis dans le cas d’une maladie hépatique très avancée, il est donc possible de détourner l’évolution de la NASH. Il est alors nécessaire de mettre en place des changements alimentaires et d’optimiser son activité physique. Un accompagnement par des professionnels de santé est conseillé, pour que l’initiation de ces nouvelles habitudes de vie soient adaptées et puissent être pérennes.